Le chasseur et son chien
Un chasseur sachant chasser doit savoir chasser sans son chien de chasse.
Ce virelangue éculé m’a dans un premier temps donné du fil à retordre, causé des difficultés de prononciation, amusé dès l’instant où je le maîtrisais mieux, intrigué quant à son origine. Mais qu’en est-il d’un chien qui va chasser sans son maître ?
C’est un fait étonnant qui s’est passée dans un village où un chien est parti chasser tout seul sans son maître. Un journaliste aurait tendu un microphone au monsieur pour recueillir son témoignage, moi, ma chandelle d’inspiration étant morte je lui prête ma plume pour écrire un mot de cette histoire.
« C’était une année de disette comme je n’en ai jamais connue, -commença le propriétaire du chien -. La saison des pluies a été longue, une tempête remplaçait un ouragan, vice versa, de jour comme de nuit. Lorsque l’orage cessa enfin on avait juste le temps d’aller arracher quelques racines comestibles : ignames, tarots, maniocs. La viande de brousse notre mets favori devenait rare de même que le poisson. On ne se nourrissait que de feuilles et de racines comme je l’avais dit, heureusement agrémentées de sauterelles ou de chenilles. Une vieille femme ayant vu apparaître une termitière dans sa propre hutte en a gardé le secret afin d’en profiter toute seule.
De mes presque cinquante ans je n’ai jamais connu je le répète de saison des pluies aussi longue.
Enfin arriva la saison sèche. Celle des floraisons, des fruits dont on attendait impatiemment le murissement, de récoltes abondantes, de chasse aux gibiers de la brousse.
Cet après-midi-là je tissais mon filet de chasse comme l’araignée sa toile. Mon chien assis auprès de moi paraissait plus haut que sa taille normale. J’ai esquissé un sourire en y pensant et j’ai eu cette vague impression qu’il me l’a rendu ce sourire. Le voilà qui se couche par terre, se frotter le dos, se gratter partout pour se débarrasser de ses puces. L’instant d’après il se remet sur ses quatre pattes, se secouer bruyamment les oreilles pour chasser les mouches. Maintenant, le voilà à nouveau qui fait des ronds sur lui-même essayant d’attraper sa propre queue !